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| موضوع: Dans une Décision récente la Cour Européenne met en balance deux intérêts : la protection de la liberté d’expression, nécessaire à la diffusion d’informations d’intérêt général et le droit à un procès équitable السبت سبتمبر 22, 2012 12:06 pm | |
| La Cour Européenne met en balance deux intérêts : la protection de la liberté d’expression, nécessaire à la diffusion d’informations d’intérêt général et le droit à un procès équitable Tout en reconnaissant le rôle essentiel qui revient à la presse dans une société démocratique, les juges européens n’en soulignent pas moins que les journalistes ne sauraient, en principe, être déliés de leur devoir de respecter les lois pénales de droit commun, en l’espèce, le respect du secret de l’instruction. Dès lors, ils recherchent “si, dans les circonstances particulières de l’affaire, l’intérêt d’informer le public sur un sujet important tel que le dopage des sportifs […] l’emportait sur les « devoirs et responsabilités » pesant sur les requérants en raison de l’origine douteuse des documents qui leur avaient été adressés (Dupuis et autres, précité, § 42) [et] […] si […] l’objectif de préservation du secret de l’instruction offrait une justification pertinente et suffisante à l’ingérence” (paragraphes 120 et 121).
1. Article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (droit à un procès équitable) Dans l’arrêt Ressiot et autres c. France, rendu le 28 juin 2012, requête n°15054/07 et 15066/07, la Cour européenne des droits de l’homme conclut, à l’unanimité, à la violation de l’article 10 de la Convention (liberté d’expression). Dans cette affaire, les juges européens devaient apprécier la proportionnalité d’une mesure de perquisition réalisée au sein des locaux de deux journaux et au domicile de journalistes accusés de recel de violation du secret de l’instruction. Faits : Les cinq requérants sont journalistes. Ils écrivaient à l’époque des faits pour le quotidien sportif L’Equipe et l’hebdomadaire Le Point. En 2004, une instruction judiciaire fut diligentée concernant le dopage éventuel de coureurs cyclistes appartenant à l’équipe Cofidis. Le 22 janvier 2004, le journal Le Point publia un article signé de trois des requérants qui reprenait in extenso certains passages des procès-verbaux de transcriptions d’écoutes téléphoniques pratiquées dans le cadre de l’enquête diligentée par la brigade des stupéfiants. Le 29 janvier 2004, un nouvel article parut dans Le Point sous la signature des mêmes journalistes ; y figurait une liste de produits prohibés découverts chez un ancien coureur cycliste lors d’une perquisition. Une enquête préliminaire fut ouverte par l’inspection générale des services (IGS) de la police nationale à la suite de ces publications. Le 4 février 2004, le parquet de Nanterre demanda à l’IGS une enquête visant les mêmes faits. Le 8 avril 2004, les sociétés Cofidis et Cofidis compétition, ci-dessous “les sociétés”, délivrèrent une assignation en référé au sujet d’un article qui devait paraître le lendemain dans L’Equipe. Elles prétendaient que les propos tenus étaient injurieux et attentatoires à la présomption d’innocence et au secret de l’instruction. Les 9 et 10 avril 2004, L’Equipe publia une série d’articles sur le même sujet, reproduisant des parties des procès-verbaux et pièces de procédure. Le 15 avril 2004, les sociétés portèrent plainte avec constitution de partie civile contre X, pour violation du secret de l’instruction et recel. Le 22 octobre 2004, l’enquête menée par l’IGS fut jointe à la procédure. Entre le 20 octobre et le 25 novembre 2004, douze policiers, trois des journalistes ainsi que le directeur du Point furent auditionnés. Le 10 janvier 2005, le juge d’instruction ordonna une perquisition au siège des journaux L’Equipe et Le Point ainsi qu’au domicile des deux premiers requérants, afin de retrouver la trace des procès-verbaux détournés. Dans les locaux du journal Le Point, un ordinateur fut saisi en vue d’une recherche de fichiers et de la consultation des messageries des journalistes. Le matériel fut ensuite restitué. Le 1er juillet 2005, le juge d’instruction transmit le dossier au parquet pour que celui-ci fasse ses réquisitions en vue de la mise en examen des cinq requérants pour recel de violation du secret de l’instruction. Dans un numéro daté des 2-3 octobre 2005, le journal Le Monde publia un entretien avec le juge instructeur de l’affaire au sujet des complications éventuelles ayant émaillé l’enquête. Celui-ci répondit que cette affaire n’était pas prioritaire pour le ministère de la justice, que les effectifs policiers qui l’assistaient étaient en nombre insuffisant et que des erreurs techniques avaient été commises. A aucun moment il ne mentionna les articles qui avaient été publiés dans Le Point et dans L’Equipe. Les requérants furent mis en examen en octobre 2005. En février 2006, les journalistes du journal L’Equipe, puis les journalistes du journal Le Point, demandèrent respectivement l’annulation de l’ensemble des actes relatifs à la perquisition réalisée au siège de leur journal, l’annulation des actes relatifs aux perquisitions domiciliaires ainsi que de l’ensemble des actes subséquents. Le 26 mai 2006, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles constata que la violation du secret de l’instruction et le recel de cette infraction avaient compromis le déroulement de l’enquête et avaient constitué une atteinte à la présomption d’innocence des personnes visées dans les articles ainsi qu’une atteinte à leur vie privée par la publication de certaines de leurs conversations téléphoniques. Cependant, après avoir souligné que les réquisitions avaient été réalisées alors que les journalistes n’avaient pas encore été entendus et alors que l’identification des contacts téléphoniques était en cours, la chambre de l’instruction de la cour d’appel annula les réquisitions visant le standard des deux journaux, ainsi que les lignes téléphoniques de certains des journalistes. Elle considéra en effet que de telles investigations n’étaient pas, au regard de l’article 10 de la Convention, des mesures nécessaires à ce stade de la procédure. En revanche, elle déclara que les saisies et mises sous scellés étaient légitimes, nécessaires et adaptées au but recherché et que l’ingérence était proportionnée au regard des exigences relatives au respect des sources d’information. Les requérants se pourvurent en cassation, mais la Haute juridiction rejeta le pourvoi après avoir repris les motifs adoptés par la cour d’appel et jugea que la décision était justifiée au regard des exigences de l’article 10 de la Convention. Le 26 mai 2009, le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Nanterre, considérant que les intéressés n’avaient pas commis de délit de violation du secret de l’instruction mais qu’ils avaient commis celui de recel de pièces du dossier de l’instruction, rendit une ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel. Le 11 mai 2010, le tribunal de grande instance de Nanterre, se fondant sur le fait qu’aucun procès-verbal ou extrait de procès-verbal n’avait été retrouvé lors des diverses perquisitions, conclut que l’infraction de recel n’était pas établie. Il prononça la relaxe des cinq requérants. Griefs: Les requérants prétendent que les investigations menées à leur encontre étaient contraires aux dispositions de l’article 10 de la Convention. Le syndicat national des journalistes et la fédération internationale des journalistes sont tiers intervenants. Décision : Sur la violation alléguée de l’article 10 de la Convention : Les juges européens rappellent que la liberté d’expression est l’un des fondements essentiels d’une société démocratique et que “la protection des sources journalistiques est l’une des pierres angulaires de la liberté de la presse. L’absence d’une telle protection pourrait dissuader les sources journalistiques d’aider la presse à informer le public sur des questions d’intérêt général” (paragraphe 99). De ce fait, toute restriction à la liberté de la presse doit, pour être conforme à la Convention, correspondre à un « besoin social impérieux » et être proportionnée au but légitime poursuivi. La Cour relève ensuite, à l’instar de ce qu’elle avait énoncé dans l’arrêt Dupuis et autres c. France, rendu le 7 juin 2007 (requête n° 1914/02), l’importance reconnue du “rôle des médias dans le domaine de la justice pénale” (paragraphe 102). Elle cite ensuite la Recommandation Rec(2003)13, sur la diffusion d’informations par les médias en relation avec les procédures pénales, adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, qui “souligne l’importance des reportages réalisés sur les procédures pénales pour informer le public et permettre à celui-ci d’exercer un droit de regard sur le fonctionnement du système de justice pénale” (paragraphe 102). Elle en déduit que toute ingérence dans la confidentialité des sources journalistiques ne peut se justifier que par un impératif prépondérant d’intérêt public. Les juges de Strasbourg vérifient que l’ingérence litigieuse était prévue par la loi. A cet égard, ils constatent que les articles applicables au moment des faits étaient les articles 11 du code de procédure pénale, relatif au secret de l’instruction, et 321-1 et 226-13 du code pénal, incriminant le recel. Ils précisent que “le fait qu’un autre tribunal de premier degré ait tranché différemment dans une affaire portant également sur des faits de recel du secret de l’enquête et de l’instruction ne suffit pas à établir que la loi était imprévisible” (paragraphe108). Ils concluent que l’ingérence était effectivement prévue par la loi au sens du second paragraphe de l’article 10 de la Convention. La Cour vérifie ensuite que l’ingérence litigieuse visait un but légitime. Elle considère que l’ingérence “visait à empêcher la divulgation d’informations confidentielles, à protéger la réputation d’autrui et plus globalement à garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire” (paragraphe 109) et qu’elle poursuivait donc un but légitime. Enfin, les juges strasbourgeois recherchent si l’ingérence était « nécessaire dans une société démocratique » pour atteindre le but poursuivi. La Cour met ici en balance deux intérêts : la protection de la liberté d’expression, nécessaire à la diffusion d’informations d’intérêt général, et le droit à un procès équitable, garanti par l’article 6 § 1 de la Convention. “[…] il convient que les journalistes, qui rédigent des articles sur des procédures pénales en cours, gardent ce principe à l’esprit, car les limites du commentaire admissible peuvent ne pas englober des déclarations qui risqueraient, intentionnellement ou non, de réduire les chances d’une personne de bénéficier d’un procès équitable ou de saper la confiance du public dans le rôle tenu par les tribunaux dans l’administration de la justice pénale” (paragraphe 112). En l’espèce, la Cour note que les requérants étaient soupçonnés de recel de violation du secret de l’instruction. Ces articles publiés portaient sur le dopage dans le sport professionnel, et plus précisément dans le milieu du cyclisme, ce que la Cour considère relever du domaine du débat d’intérêt public. Elle constate, par ailleurs, que les articles litigieux “répondaient à une demande croissante du public, désireux de disposer d’informations sur les pratiques de dopage dans le sport et les problèmes de santé qui en découlent” (paragraphe 116). Tout en reconnaissant le rôle essentiel qui revient à la presse dans une société démocratique, les juges européens n’en soulignent pas moins que les journalistes ne sauraient, en principe, être déliés de leur devoir de respecter les lois pénales de droit commun, en l’espèce, le respect du secret de l’instruction. Dès lors, ils recherchent “si, dans les circonstances particulières de l’affaire, l’intérêt d’informer le public sur un sujet important tel que le dopage des sportifs […] l’emportait sur les « devoirs et responsabilités » pesant sur les requérants en raison de l’origine douteuse des documents qui leur avaient été adressés (Dupuis et autres, précité, § 42) [et] […] si […] l’objectif de préservation du secret de l’instruction offrait une justification pertinente et suffisante à l’ingérence” (paragraphes 120 et 121). Ils constatent que les mesures prises par les autorités, entre le 24 septembre 2004 et janvier 2005, furent relativement tardives, les articles ayant été publiés les 22 et 29 janvier 2004, et les 9 et 10 avril 2004. Ils ajoutent qu’au moment où les perquisitions et interceptions téléphoniques ont eu lieu, elles “avaient pour seul but de révéler la provenance des informations relatées par les journalistes dans leurs articles. En effet, les démarches entreprises par les enquêteurs précédemment n’avaient pas permis de déterminer l’auteur ou les auteurs d’une éventuelle violation du secret de l’instruction ou du secret professionnel” (paragraphe 122). La Cour en déduit que ces informations tombaient manifestement dans le domaine de la protection des sources journalistiques. “La Cour souligne que le droit des journalistes de taire leurs sources n’est pas un simple privilège qui leur serait accordé ou retiré en fonction de la licéité ou de l’illicéité des sources, mais un véritable attribut du droit à l’information, à traiter avec la plus grande circonspection” (paragraphe 124). Elle observe l’ampleur des mesures ordonnées dans cette affaire. Par ailleurs, elle relève que si certaines de ces mesures ont été annulées, en revanche, “la saisie et le placement sous scellés des listings des appels des premier et deuxième requérants, les perquisitions et saisies opérées le 13 janvier 2005 aux sièges des journaux Le Point et L’Equipe et les perquisitions opérées aux domiciles des deux premiers requérants furent validées par la chambre de l’instruction sans que soit démontrée l’existence d’un besoin social impérieux” (paragraphe 125). La Cour en conclut que “le gouvernement n’a pas démontré qu’une balance équitable des intérêts en présence a été préservée” (paragraphe 126). Dès lors, sans remettre en cause la pertinence des motifs invoqués, les juges européens considèrent que ceux-ci n’étaient pas suffisants pour justifier les perquisitions et les saisies mises en œuvre. Ainsi, “les mesures litigieuses ne représentaient pas des moyens raisonnablement proportionnés à la poursuite des buts légitimes visés, compte tenu de l’intérêt de la société démocratique à assurer et à maintenir la liberté de la presse” (paragraphe 127). A l’unanimité, ils concluent donc qu’il y a eu violation de l’article 10 de la Convention. Sur l’application de l’article 41 de la Convention : Au titre de la satisfaction équitable, la Cour dit que le constat de violation constitue en soi une satisfaction équitable suffisante au préjudice moral subi par les requérants. En revanche, elle dit que la France doit verser, pour frais et dépens, conjointement aux deux premiers requérants, 18 896,80 euros et, conjointement aux troisième, quatrième et cinquième requérants, 25 064,78 euros.
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