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 La déontologie des magistrats :ETHIQUE, DEONTOLOGIE ET SANCTION

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مُساهمةموضوع: La déontologie des magistrats :ETHIQUE, DEONTOLOGIE ET SANCTION   La déontologie des magistrats   :ETHIQUE, DEONTOLOGIE ET SANCTION Emptyالسبت مارس 13, 2010 6:22 pm

ETHIQUE, DEONTOLOGIE ET SANCTION
La déontologie des magistrats est un sujet débattu de façon universelle au sein de tous les
systèmes judiciaires. La matière est difficile et demande une analyse précise, dans la
mesure où la notion de déontologie des magistrats recouvre deux obligations de nature
différente :
- les devoirs professionnels du magistrat, déjà énoncés dans les codes spécifiques
et dans le statut de la magistrature (par exemple le devoir d’impartialité, l’obligation
de respecter le principe du contradictoire)
- l’éthique, qui renvoie au comportement individuel du juge, dans l’exercice de sa
profession et dans sa vie personnelle
Si le non respect de la première catégorie d’obligations peut aisément faire l’objet de
sanctions disciplinaires, il en va autrement pour les obligations de nature éthique, dont le
contour est sensiblement plus incertain.
En effet, les règles éthiques étant par nature définies de façon peu précise (par exemple
« obligation de convenances »), assortir leur non respect de sanctions disciplinaires peut
conduire à des atteintes sérieuses à l’indépendance de l’autorité judiciaire, dès lors qu’un
pouvoir exécutif hostile pourrait, sur ce fondement, s’emparer de l’action disciplinaire pour
s’attaquer à un magistrat dont, en réalité, les décisions juridictionnelles lui déplaisent.
Il n’est pas exagéré de soutenir qu’un code de déontologie comportant des règles éthiques
dont la méconnaissance est en elle-même une cause de mise en jeu de la responsabilité
disciplinaire peut constituer entre les mains du pouvoir exécutif une machine de guerre
contre l’indépendance de la justice.
Dans les années 1990 les présidents de Cours suprêmes de common law ont adopté les
“Principes de Bangalore” contenant un recueil d’obligations éthiques et déontologiques.
Ces principes ont été ensuite adoptés, avec quelques modifications, par les présidents des
Cours suprêmes de droit romano-germanique.
Il suffit de citer deux exemples tirés de ce texte pour avoir une idée de la difficulté
d’engager des poursuites disciplinaires pour un non respect des principes énoncés:
- En toute circonstance, le juge veille à ce que sa conduite soit irréprochable aux
yeux d’un observateur raisonnable
On remarque à la fois le caractère extensif du domaine visé (« en toute circonstance »),
l’imprécision du fait lui-même (conduite « irréprochable ») et celle du critère de référence
(observateur « raisonnable »).
- Le juge doit éviter toute inconvenance réelle ou apparente dans toutes ses
activités professionnelles ou extraprofessionnelles
1 Considérants 45 et 46, page 8
2 Considérant 48, page 9
Outre le fait que la définition d’une inconvenance « apparente » se heurte à une difficulté
manifeste, la même observation peut être présentée à la fois pour le caractère exhaustif
des activités visées et pour l’imprécision de la notion d’inconvenance.
Positions adoptées à l’étranger
Les attitudes adoptées par les différents pays rangent ceux-ci en deux écoles :
- les États-Unis et les pays d’Europe de l’Est ont adopté des codes comportant des
obligations précisément énoncées, chacune assortie de sanctions disciplinaires
- le Canada et les pays d’Europe de l’Ouest se sont prononcés pour l’adoption de
principes déontologiques et renvoient à des comités de concertation et de conseil
(Canada) ou à la jurisprudence de l’organe disciplinaire (Europe de l’Ouest) pour
l’appréciation au cas par cas de la violation des principes déontologiques.
Le Conseil consultatif des juges européens
Le Conseil consultatif des juges européens (CCJE) créé au sein du Conseil de l’Europe
s’est prononcé sur cette question, dans un avis du 19 novembre 2002 adressé au Comité
des Ministres (CCJE 2002 Op. n/3). Le document, fortement argumenté, ne manque pas
d’intérêt.
Le CCJE écrit notamment1 :
« Les normes déontologiques sont différentes des règles statutaires et disciplinaires. Elles
expriment une capacité de la profession de réfléchir sa fonction dans des valeurs en
adéquation avec les attentes du public et en contrepartie des pouvoirs attribués. Ce sont
des normes d’autocontrôle qui impliquent de reconnaître que l’application de la loi n’a rien
de mécanique, relève d’un réel pouvoir d’appréciation et place les juges dans un rapport
de responsabilité vis-à-vis d’eux mêmes et des citoyens.
En outre, la codification de la déontologie pose certaines difficultés; notamment un code
de déontologie peut susciter l’illusion qu’il contient la totalité des règles et que tout ce qui
n’est pas interdit est permis, il tend à trop simplifier les situations, il fige enfin la déontologie
à une période donnée alors qu’il s’agit d’une matière évolutive. Le CCJE suggère qu’il est
souhaitable de préparer et d’évoquer une«déclaration de principes de conduite
professionnelle », plutôt qu’un code ».
Il ajoute2 :
3 Organe ou personne ayant un rôle consultatif ou de conseil auquel le juge pourrait s’adresser en cas d’hésitation sur la compatibilité d’une
activité privée avec sa situation de magistrat
« Le CCJE tient à souligner que la nécessité impérieuse de sauvegarder l'indépendance
des juges suppose que lorsque l’on envisage l'élaboration d'une déclaration de normes de
déontologie, celle-ci soit fondée sur deux principes essentiels :
i) d'abord, elle devrait se référer aux principes fondamentaux de déontologie et affirmer qu’il
est impossible de dresser une liste exhaustive de comportements interdits au juge qui
seraient préalablement définis ; les principes édictés devraient constituer des instruments
d’autocontrôle des juges, c’est-à-dire des règles générales qui sont des guides d'action.
Aussi, bien qu’il y ait tant chevauchement qu’effet réciproque, la déontologie devrait-elle
rester indépendante du système de discipline des juges, en ce sens que la
méconnaissance d’un de ces principes ne devrait pas pouvoir être en elle-même une cause
de mise en jeu de la responsabilité disciplinaire, civile ou pénale ;
ii) ensuite les principes de déontologie devraient être l’émanation des juges eux-mêmes ;
ils devraient être conçus comme un instrument d'autocontrôle du corps, généré par luimême,
qui permet au pouvoir judiciaire d'acquérir une légitimité par l'exercice de fonctions
dans le cadre de standards éthiques généralement admis. Une large concertation devrait
être prévue, éventuellement sous l’égide d’une personne ou d’un organe mentionnés dans
le paragraphe 293, qui pourraient en outre avoir pour tâche d’expliquer et d’interpréter la
déclaration de principes de conduite professionnelle ».
Le Conseil supérieur de la magistrature lance, en France, une réflexion en vue de
l’adoption de normes déontologiques. La dernière recommandation ci-dessus est pour
l’instant suivie, puisqu’une concertation est lancée au sein de la profession, avec
désignation de représentants des magistrats dans chaque cour d’appel.
La suite du processus devrait pareillement s’inspirer des recommandations du CCJE, tant
il est vrai que la définition autoritaire de règles éthiques et déontologiques présente un
risque manifeste d’atteinte à l’indépendance des juges, spécialement lorsque leur non
respect est conçu comme un motif d’engagement de poursuites disciplinaires.
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