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 Interview Ahmed Rahmouni : «Les magistrats doivent faire partie de l’Assemblée constituante» -le quotidien-15-3-2011

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Interview Ahmed Rahmouni : «Les magistrats doivent faire partie de l’Assemblée constituante» -le quotidien-15-3-2011 Empty
مُساهمةموضوع: Interview Ahmed Rahmouni : «Les magistrats doivent faire partie de l’Assemblée constituante» -le quotidien-15-3-2011   Interview Ahmed Rahmouni : «Les magistrats doivent faire partie de l’Assemblée constituante» -le quotidien-15-3-2011 Emptyالأربعاء مارس 16, 2011 4:21 pm

Interview Ahmed Rahmouni : «Les magistrats doivent faire partie de l’Assemblée constituante» -le quotidien-15-3-2011



Interview Ahmed Rahmouni : «Les magistrats doivent faire partie de l’Assemblée constituante» -le quotidien-15-3-2011 Ahmed-rahmouni13-03-2011

Après une Assemblée générale extraordinaire houleuse qui a fini à huis clos, Ahmed Rahmouni, président de l’Association des magistrats tunisiens (AMT), a répondu à nos interrogations et nous en a confié les tenants et aboutissants.

Pourquoi votre Assemblée générale extraordinaire s’est-elle déroulée à huis clos?

Parce que, étant la première Assemblée après la Révolution, nous savions que beaucoup de noms allaient y être cités et âprement critiqués et nous ne pouvions pas permettre que l’Association des magistrats tunisiens donne ce spectacle. De plus, la présence des médias aurait naturellement biaisé l’attitude des uns et des autres et nous avons donc choisi le huis clos pour régler les différends et sortir avec du constructif.

Les magistrats sont-ils sortis vraiment unis de l’Assemblée de l’AMT ? Y ont-ils réussi leur révolution?

Je considère que les magistrats tunisiens, même avant leur dernière Assemblée générale, étaient unis et ceci est apparu quand nous sommes entrés automatiquement en phase avec les principes de la Révolution tunisienne. C’est aussi le jour où la grande majorité des magistrats ont été debout devant les portes du Palais de justice pour crier des slogans longtemps scellés dans les poitrines, car la Révolution ne peut continuer sans une justice indépendante sous un grand titre : «la libération de la justice».

La dernière Assemblée n’est qu’une formulation pour les ambitions des juges aux premiers moments de la Révolution et ils y ont exprimé, le 13 mars, de manière directe leurs revendications nationales, judiciaires et internes.

Les juges ont-ils réussi leur révolution, dites-vous ? Ce que l’on peut dire, c’est qu’une partie des juges, dont le Bureau exécutif actuel, a été au cours de la période avant Révolution, parmi ceux qui ont contribué d’une manière ou d’une autre à faire face à l’ancien régime. L’attitude de l’AMT est restée, depuis le putsch dirigé contre elle en 2005, attachée aux mêmes slogans que les magistrats expriment aujourd’hui. Pour cela, nous considérons que construire une justice indépendante, impartiale et transparente fait partie intégrante des principes de la Révolution.

Nous souhaitons également faire partie de la Commission de Défense des acquis de la Révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique.

Vous avez décidé de rompre définitivement avec le système judiciaire de l’ancien régime. Comment et avec quels partenaires ?

Rompre avec l’ancien régime et jeter les bases d’une nouvelle étape est au cœur de la Révolution. Je vous fais remarquer qu’un Pacte pour la Révolution, un texte fondateur qui établit les principes et les responsabilités, n’a pas encore été écrit !

Rompre veut dire démanteler l’ancien régime, tous ses symboles, le système sécuritaire corrompu... puis parvenir à la démocratie politique, à des garanties pour pratiquer les libertés, à un système politique équilibré... Toute vision de la justice de demain ne peut sortir de ces principes : consécration d’un système judiciaire indépendant et établissement de la justice comme un Pouvoir tel que l’énoncent les principes républicains, et entourer ce système de toutes les garanties nécessaires. On ne peut édifier la Tunisie nouvelle sans la justice, sans couper avec un système qui a fait perdurer une situation constitutionnelle restée amputée. Concrètement, en plus de s’attaquer à la corruption, il faut réussir sans tarder la libération de la magistrature alors que c’est l’administration de la justice qui est à l’origine du mal.

Des partenaires ? Je pense que tant qu’une magistrature libre est au cœur des principes de la révolution, la logique de jeter de nouvelles bases va s’imposer. L’élection d’une Assemblée constituante va déterminer la situation constitutionnelle du pouvoir judiciaire et la Constituante est donc notre partenaire. En conséquence, il est capital que l’ATM soit présente au sein de l’Assemblée constituante pour apporter contribution et vision des principes qu’il faut y inclure constitutionnellement.

Les magistrats se sont-ils entendus sur le rôle qu’ils auront à jouer dans la période de transition par laquelle la Tunisie est en train de passer ?

Notre rôle est essentiel pour défendre les libertés publiques et réussir le passage vers la démocratie. Car on ne peut parler d’impartialité électorale sans une magistrature indépendante et il n’est pas possible de reporter les garanties nécessaires à la magistrature, y compris dans la période de transition. Cela est en relation avec la gestion de la justice et j’insiste sur le fait que nous ne pouvons pas aller vers des élections alors que le ministère de la Justice conserve les mêmes pratiques.

Quels sont, concrètement, les préparatifs du prochain Congrès ? Une date peut-elle être rapidement fixée ?

L’invitation à un congrès exceptionnel selon nos statuts se fait sur demande du Bureau exécutif de l’ATM ou du tiers des membres de l’association (près de 1400 sur les 2100 magistrats qu’elle compte).

L’actuel BE est prêt à appeler à un tel congrès parce que l’intérêt des magistrats l’impose et la dernière Assemblé l’a recommandé. L’amendement de l’article 13 et ceux qui y sont reliés a entravé la fixation d’une date et des pas pratiques pour le tenir mais le conseil national (plus d’une quarantaine de membres) de l’ATM énoncera bientôt un projet d’amendement de ces articles (car l’Assemblée n’en a pas la latitude) et ce projet sera proposé à la prochaine Assemblé générale. Il faut soulignenr que, dès que le nouveau BE est venu, nous avons entamé les élections de plus de 40 magistrats à nos structures de manière démocratique directe et toute la gestion de l’ATM sera faite de manière démocratique.

Pour revenir au congrès, celui-ci ne sera pas seulement électif, il sera le 1er dans la nouvelle étape après la Révolution et il aura à clarifier les orientations des magistrats. Car la prochaine étape est difficile : après le 24 juillet, il faudra des mois pour écrire la Constitution, puis d’autres mois pour les élections.

L’amendement de l’article 13 du statut de l’AMT et l’orientation vers sa plus grande représentativité dans les régions mèneront-ils à un rôle plus «politique» pour les magistrats ?

Pourquoi nécessairement ? Dans aucun cas on ne veut faire que nos revendications soient politisées même si, pour certaines parties, la revendication de l’indépendance de la magistrature est une revendication politique. Si le magistrat, en tant qu’individu, est attaché à l’obligation de réserve, l’AMT, avec sa représentativité, ne peut s’attacher à cette obligation car la défense des intérêts légitimes des magistrats impose de faire fi de ce devoir.

Auriez-vous besoin d’une aide étrangère, par exemple de la part de nos partenaires européens, pour que notre système judiciaire devienne totalement conforme aux standards internationaux ?

L’indépendance du pouvoir judiciaire est parmi les principes fondamentaux de la justice en démocratie et il ne peut y avoir de système judiciaire digne de ce nom en l’absence de ces principes. Cependant, bénéficier des expériences et des exemples étrangers représente un enrichissement incontestable pour l’expérience tunisienne après la Révolution. Mais je répète que nous ne devons pas oublier que nos traditions judiciaires depuis des dizaines d’années représentent une plate-forme respectable et capable d’évoluer.

Les magistrats sont-ils en train de formuler des recommandations officielles pour que la nouvelle Constitution de la Tunisie englobe les principes du 3e Pouvoir ?

Alors que nous sommes dans une période de fondation, ce qui n’a pas été à l’ordre du jour au début de la Révolution et ce à quoi les magistrats s’attachent aujourd’hui, c’est d’énoncer leurs orientations pour la nouvelle Constitution dès maintenant. Car les magistrats ont l’ambition de faire partie de l’Assemblée constituante pour aider à écrire les principes ayant trait à l’indépendance de la magistrature et souligner l’importance de l’unification de toutes les ramifications de la justice, y compris le Tribunal administratif, la Cour des comptes et le Comité du contrôle financier. Ces institutions doivent sortir du giron de l’administration car le 3e pouvoir ne doit pas être divisé pour être en mesure d’assurer son indépendance.


Manoubi AKROUT
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